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JOURNAL
DE LA BELGIQUE
DE L’HORTICULTURE BELGE ET ÉTRANGÈRE,
publié am le concours
BES AMATEI,BS ’ DES boktichtkibs et des présidents
DE SOCIÉTÉS D HORTICILTÉRE
DES Plis COTOt* EN belgiqee et a l'étranger ;
SOLS Ü DIRECTION
IL Snntk,
in professe» dé^ôtanS rtdfzodogiel' mtenéTuT' d' l ””" 66
ex-vo valeur nature + , c Atlienee Royal de Luxembourg
a voyageur naturaliste du gouvernement be]o- e
et • ^ embre dephlsieurs sociétés savantes *
et secretaire-adjoiut de la Société Eoyale de Hore-de Bruxelles.
Cinquième ftnné6
Octobre l$G 4
PARIS,
CHEZ A. GOIN, ÉDITEUR
‘ 82, rué des Écoles.
BRUXELLES,
V e PARENT & FILS, ÉDITEURS.
17, raobtague de S»on.
'YdeDoncK^
TRAVAUX DU MOIS.
Jardin fruitier. — On commencera la récolte des fruits d’hiver, par un temps
sec ; on aura soin de prendre les fruits un à un, pour éviter de les blesser, et on les
placera pendant quelques jours dans un endroit sec avant de les caser dans le
fruitier. On récoltera également les pépins de poires et de pommes pour les semer
de suite. On renouvellera la terre au pied des arbres fruitiers, mais on se gardera
de les fumer avant l’hiver On préparera le terrain pour recevoir tes arbres à
déplanter en novembre, et on marquera dans la pépinière les arbres à lever ou à
déplanter.
Couches. — On entretiendra une température convenable dans les couches à
ananas, et on ne les arrosera qu’avec de l’eau à la même température que la cou-
che. On préparera quelques châssis froids pour abriter certaines plantes vivaces
délicates, telles que : Cypripedium, etc.
Jarihn d’agrément. — On amassera des feuilles sèches et on coupera les tiges
des plantes vivaces qui ont cessé de fleurir.
On donnera une dernière façon aux allées, et on fera des semis de plantes
annuelles qui ne craignent pas le froid.
Les Dahlia et les Chrysanthèmes faisant le plus bel ornement de nos jardins en
cette saison, on facilitera leur floraison en retranchant les fleurs fanées et les tiges
inutiles. On continuera à remettre en pots les plantes d’orangerie qui ont été con-
fiées à la pleine terre. On abritera les tuteurs, étiquettes, vases, etc., qui ne sont
d’aucune utilité pendant d’hiver.
Serres chaudes. — Les temps humides et pluvieux d’automne causent dans les
serres chaudes des dégâts occasionnés par la décomposition et la pourriture des
parties désorganisées des plantes. On y remédiera par des soins minutieux de
propreté, en aérant la serre pendant le milieu du jour quand le ciel est serein
ou en chauffant légèrement, pour faciliter l’évaporation. On diminuera les
arrosements et on cessera les seringuages. On donnera aux plantes le plus de
lumière possible. Quant aux espèces qui sont constamment en végétation (telles
que certains Palmiers), on s’attachera à la favoriser, soit en les plaçant sur une
couche de tan, soit en élévant la température.
On continuera la multiplication de certaines espèces de plantes d’une repri se
lente.
Après une journée très-chaude, on devra faire du feu, le soir, pour prévenir
une transition trop forte pendant la nuit.
Serres froides et orangeries. — • Il est prudent de rentrer toutes les plantes
de cette catégorie, qui, tout en ne craignant pas le froid, ne tarderaient pas à jau-
nir par l’excès d’humidité. On labourera la surface des pots et des caisses, et on
arrosera très-modérément.
On soignera attentivement les jeunes plants de Calcéolaires, Cinéraires , Pn-
mula sinensis, et on leur donnera le plus d’air et de lumière possible. On rentrera
aussi quelques pieds de Chrysanthèmes, dont la floraison se prolongera en oran-
gerie jusqu’au moment de la floraison des Camellias.
On continuera à planter en pots les oignons de Jacinthes à forcer, ainsi que des
toutfes de Dielytra, Spirea , Deutzia, Weigelia , que l’on forcera dès le mois de
décembre.
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PLANTES FIGURÉES.
PETUNIA VARIÉS.
4. Comtesse Authier ; — 2. Ami Falloux; — 3. M. Linden; — 4. Triomphe de
l’Ailier.
Planche XVIII.
Les quatre Pétunia à fleurs doubles dont nous offrons aujourd’hui
la figure, sont le produit des efforts soutenus d’un de nos amateurs les
plus zélés, c’est-à-dire de ceux qui possèdent le feu sacré de la flori-
culture. Après cinq ans d’hybridation continue, M. le vicomte Du Buis-
son, au château de Vernet, près Saint-Pourçain (France), est parvenu à
créer, en quelque sorte, une nouvelle race de Pétunia qui se distingue
des variétés ordinaires par quelques caractères saillants : les feuilles
sont plus grandes, plus arrondies, ondulées et d’une couleur vert pâle
ou jaunâtre, ce qui donne à la plante une teinte semi-chloratique . Les
fleurs, surtout les doubles, étant d’une texture très-épaisse, résistent
mieux que celles des variétés ordinaires aux pluies et aux vents. La
corolle en est énorme, allongée en entonnoir, à divisions du limbe
tourmentées, ondulées et gauffrées, ce qui produit des teintes cha-
toyantes et glacées d’un très-bel effet; elles exhalent de plus une odeur
des plus suaves, qui varie d’une variété à l’autre. La diversité de leurs
formes, renversées, chiffonnées, aplaties ou bombées, leur dimen-
sion qui rivalise avec celle des Pivoines, leur longue floraison qui ne
s’arrête qu’aux premières gelées, en font une race de premier ordre.
M. le vicomte Du Buisson a obtenu, depuis 1 859, 48 variétés de
premier choix. A l’exposition horticole de Moulins (Allier) le jury lui a
décerné la grande médaille de vermeil, faveur qui n’avait jamais été
accordée à un horticulteur amateur.
De toutes les fleurs coupées qui nous furent envoyées, cette année,
à l’inspection, nous n’avons eu le temps que de reproduire les quatre
variétés en question ; les autres étant plus ou moins fanées ou pas
assez avancées, il nous fut impossible d’en reproduire assez exacte-
ment la forme et les nuances. Nous nous réservons donc de les faire
Octobre 4861. 19
— 218 —
connaître ultérieurement, et nous profiterons de cette occasion pour
initier nos lecteurs au mode de culture adopté par M. Du Buisson et
qui lui a valu ses succès.
REVUE DES PLANTES NOUVELLES OU RARES.
BOTANICAL MAGAZINE .
uemirobuim HUiü , Hook. , Bot. Mag ., pl. 5261. — Fam. des
Orchidées. — Gynandrie Monandrie.
Sans pouvoir être compté parmi les espèces à grandes et brillantes
fleurs, ce Dendrobium peut être rangé parmi les plus élégants et
les plus gracieux de son genre : ses tiges et ses feuilles sont de pre-
mière dimension et se rapprochent beaucoup, quant à leur aspect
général, de Yhabitus du D . speciosum avec lequel on pourrait facile-
ment le confondre; il en diffère pourtant notablement par son im-
mense racème de fleurs blanches, de moyenne grandeur, très-serrées,
qui lui donnent plus ou moins l’apparence d’une grappe de Saccolabium .
Celte plante, qui diffère du D . undulatum par ses pétales non
ondulés, a été envoyée au jardin royal de Kew, par M. Walter Ilill,
le super-intendant du jardin botanique de Moreton-Bay (Nouvelle-
Hollande).
comphia oiivæformis , Saint-Hil., Flore du Brésil , v. I, p. 67. —
Gomphia decorans, Lem., Jard . fleur., v. IV, pl. 415. Bot . Mag .
pl. 5262 — Fam. des Ochnacées. — Pentandrie Monogynie. —
Serre tempérée.
Les Gomphia sont de jolis arbrisseaux ou petits arbres des régions
tropicales, de l’Amérique du Sud, à belles fleurs, à feuillage orne-
mental et sont encore rares dans les collections. Celui-ci, originaire du
Brésil, d’où il a été introduit en Belgique, dans l’établissement de
M. De Jonghe, à Bruxelles, par M. Libon, fut décrit sous le nom de
decorans , par M. Lemaire, dans le Jardinier fleuriste. Sir W. Hooker
le rapporte au G. olivœformis , d’après un échantillon qui vient de
fleurir dans les serres de MM. Henderson et fils, de Wellington-Nur-
sery, à Londres.
— 219
C’est un arbrisseau à belles feuilles dures, lancéolées-elliptiques,
acuminées, finement serrulées dans leurs parties supérieures seule-
ment; les fleurs, d’un beau jaune d’or, forment une belle panicule
terminale. Sa floraison a lieu au mois de mai.
Nous ajouterons qu’une seconde espèce, du même pays se trouve
aujourd’hui dans les serres de M. Linden sous le nom de Gomphia
Theophrasta ; elle diffère de l’autre par ses feuilles beaucoup plus
grandes, entièrement dentelées, se rapprochant par leur texture et
leur taille de celles du Theophrasta impérialis.
Caladium foicolor, var. Versclaaffeltîl , ÏIOOK, Bot. Mag. y pl. 5263.
Caladium Verschaffeltii , Lem., Illust. hort. — Fam. des Aroidées. —
Monœcie Monandrie. — Serre chaude.
Ce que nous avons dit, dans notre livraison précédente au sujet du
Caladium Cliantinii , nous le répétons pour celui-ci. Sir W. Hooker
semble rapporter toutes ces variétés au type bicolor.
Ceriuthc retorta, Sm. in Sibth., fl. grœca, v. II, p. 60. Bot. Mag. y
pl. 5264. — Fam. des Borraginées. — Pentandrie Monogynie. —
Pleine terre.
En voyant la figure de cette jolie plante , qui vient de fleurir en
plein air, à Kew, nous avons été surpris de ne jamais l’avoir remar-
quée nulle part dans nos jardins, et cependant peu de plantes méri-
tent, plus que celle-ci, les honneurs de la culture. C’est une espèce
herbacée à feuilles obovées-spathulées, embrassantes, d’un vert pâle
entremêlé de macules blanchâtres, ou de taches rouges dans celles des
jeunes pousses. L’inflorescence est en épis terminal, scorpioïde au
sommet. Les bractées florales sont d’abord vertes, foliacées et dis-
tancées; puis finissent par s’imbriquer et deviennent violettes ou
pourpres au sommet de l’épis. Les fleurs qui naissent entre ces brac-
tées passent du jaune pâle au jaune foncé; elles sont tubuleuses-
claviformes, brusquement rétrécies à la gorge où elles sont marquées
extérieurement d’un cercle d’un pourpre foncé; le limbe est court et
d’un violet pâle.
Cette plante est originaire du Peloponèse ; on la trouve aussi eu
Dalmatie.
— 220 —
Chysls aurea, var. Ummlugliei , HOOK, Bot . Mag., pl. 5265, —
Chysis Limminghei , cat . de J. Linden. — Fam. des Orchidées. —
Gynandrie Monandrie. — Serre chaude.
Dans la notice historique que Sir W. Hooker donne de ce Chysis ,
que M. Linden a nommé « Limminghei , » en l’honneur du jeune
comte Alfred de Limminghe, et que le botaniste anglais rapporte à
l’espèce aurea, il dit que cette variété passe pour être originaire du
Guatemala ( Central-America ) et qu’à sa connaissance aucune descrip-
tion n’en a été faite encore.
Quant à la première assertion du savant botaniste anglais, nous ne
sommes pas, en ce moment, en position de la contredire; mais en
présence de la forme plus ramassée et épaisse des pseudobulbes du
Chysis Limminghei (non Lemminghei) et , de plus, en prenant en
considération les stations et les hauteurs différentes où croissent ces
deux plantes, nous serions presque autorisé à ne pas admettre cette
identité spécifique. En effet, tandis que notre plante croît, non pas au
Guatemala, mais bien au Mexique, dans les forêts du littoral de la pro-
vince de Tabasco, le Chysis aurea ne végète que dans les forêts humides
de l’intérieur, entre 1000 et 2000 pieds au-dessus du niveau de la
mer. Le Chysis Limminghei a été trouvé et récolté par le voyageur
naturaliste Ghiesbreght en 1856 et introduit dans rétablissement de
M. Linden à Bruxelles.
Une description de cette plante faite par M. Ch. Lemaire a paru
l’année dernière, dans V Illustration horticole .
C’est aujourd’hui la plus belle du genre : ses bulbes sont relative-
ment courts, fusiformes, très-épais au milieu; ses fleurs sont d’un beau
blanc de crème, lavées de rose et comme glacées; le labelle est mar-
qué de taches et de stries carmin ou pourpre.
GARTENFLORA .
statice fruticans , Wibb. pl. 519, mars 1861. — Espèce intéres-
sante des îles Canaries et voisine du S. arborescens , dont elle diffère
cependant par sa tige florale aplatie et tranchante aux deux côtés
et par les ramifications de celle-ci visiblement ailées. Les fleurs lilas
sont à centre plus foncé; les feuilles sont entières, coriaces, ondulées,
d’un vert bleuâtre.
— 221
aris scfosa, Pàll. ; livr. d’avril 1861, p!. 522. — Plante recom-
mandable pour la pleine terre, à fleurs grandes, d’un bleu violet et
qui se distingue par l’exiguité de ses pétales intérieurs. Elle est origi-
naire de la Sibérie.
Dendrobium primuiinum , Lindl; livr. de mai 1861, pl. 526. —
Le Gartenflora nous offre une très-belle figure de ce joli Dendrobium
à pétales roses et à labelle blanc, que S. W. Hooker a fait figurer
pl. 5005 du Bot. Mag. sous le nom de D. nobile palidiflorum.
Tydæa pyraïuidalis muUiflora^ livr. de juin, pl. 528. — Nou-
velle et remarquable variété obtenue du croisement des « Isoloma
Trianœi et T. Meyerbeer » par MM. J. J. Gottholdt et C ie à Arnstadt.
L’abondance de sa floraison et la riche nuance d’un rouge de feu de
scs corolles en font une plante très- méritante. La même livraison
représente six variétés nouvelles de Viola tricolor maxima , très-dis-
tinguées, obtenues par le même horticulteur.
Nerinc sarnienslg, var. venusta, pl. 552, liv. de juillet 1861. —
Plante bulbeuse déjà ancienne, mais toujours nouvelle par sa beauté.
Elle diffère de l’espèce type par ses fleurs couleur cinabre tandis que
l’autre les a roses.
Antl’ospernium Kraussli, SCHULTZ ; livr. d’août 1861, pl. 555. —
Plante de la famille des composilées, cultivée depuis dix ans dans les
jardins sous les noms de Venidium arctotoides , calendulaceum et
multiflorum. C’est une espèce annuelle, encore peu répandue et qui ne
manque pas de mérite. Elle est de petite taille, à feuilles presque
lyrées, velues, d’un vert pâle émettant de nombreuses tiges florales
uniflores, à grandes fleurs d’un jaune d’or. On la sème, comme la
plupart des plantes annuelles, en mars ou en avril.
— 222
REVUE DE L'HORTICULTURE FRANÇAISE.
Les nouveautés et les découvertes en horticulture. — Les auteurs anciens. — Le
pincement. — Culture des arbres fruitiers dans les sols arides et peu profonds.
— L’Érable à sucre. — Les Eucalyptus. — Nouveau mode de taille du groseitler.
— Perfectionnement dans la culture du melon. — Les pommes de terre Blan-
chard et Marjolin. — Culture simplifiée du champignon de couche. — Cres-
sonnières artificielles.
Il n’y a rien de nouveau sous le soleil; cette vérité, devenue banale
à force d’être répétée, trouve de fréquentes applications en horticul-
ture. Il est rare que la communication d’un nouveau procédé ne soit
pas suivie de réclamations de priorité, en faveur d’auteurs anciens ou
contemporains. Cela ne doit pas nous étonner. L’horticulture ne date
pas d’hier; depuis plusieurs siècles, on a beaucoup écrit sur cette ma-
tière. On ne saurait exiger des amateurs, et encore moins des jardiniers,
qu’ils connaissent tous les ouvrages publiés, ouvrages dont plusieurs
sont du reste très-volumineux, souvent fort rares et d’un prix élevé.
Aussi ne saurait-on trop hautement approuver la publication des
abrégés, tels que celui queM. Ch. Morel vient de donner de l’ouvrage
de la Quintynie (4). L’honorable vice-président de la Société centrale
d’horticulture a présenté sous une forme succincte les instructions du
célèbre jardinier sur la culture des arbres fruitiers et des plantes pota-
gères, qu’il a mises, par de savantes additions, au niveau des progrès
de la science. Un travail analogue sur les ouvrages d’Olivier de Serres
ne manquerait pas d’intérêt.
Des résumés clairs et précis, au moins pour les auteurs classiques,
indiquant d’une manière sommaire ce qui appartient en propre à
chacun d’entre eux, seraient de la plus grande utilité, en ce qu’ils
diminueraient le nombre de ces prétendues découvertes, dont les au-
teurs sont d’ailleurs le plus souvent de très-bonne foi, ne connaissant
pas et ne pouvant pas connaître tout ce qui a été écrit avant eux.
Quant à nous, on comprend que nous ne pouvons entrer chaque fois
dans de longues discussions, qui auraient pour nos lecteurs un intérêt
purement secondaire. Nous continuerons donc à enregistrer les faits
nouveaux, ou du moins oubliés et remis en lumière, en un mot assez
(1) Un vol. in-8° avec figures. Prix, 5 fr. — Ve Parent et Fils, éditeurs,
montagne de Sion, 17, à Bruxelles.
— 225 —
peu connus pour qu’il y ait lieu d’appeler sur eux l’attention des hor-
ticulteurs. Nous désirons rendre justice à tous, sans pour cela décou-
rager les travailleurs consciencieux.
La question du pincement est toujours en litige. Si les arboricul-
teurs éminents 'que compte dans son sein la Société centrale se sont
généralement montrés peu favorables à la nouvelle méthode, des maî-
tres qui font justement autorité, MM. Du Breuil, Baltet, Lahérard et
autres l’ont hautement approuvée. Nous tiendrons nos lecteurs au cou-
rant de la discussion.
On sait que généralement le Poirier ne prospère pas dans les sols
arides et peu profonds; greffé sur franc, il arrive rarement à prendre
possession du sol et à y trouver la nourriture convenable ; sur coignas-
sier, après avoir végété péniblement deux ans au plus, il se couronne,
jaunit et meurt. Le hasard a fait découvrir à M. Thirion (de Senlis)
que des poiriers greffés sur franc, plantés, à l’âge de deux ans, dans des
pots de O m , 25 à O m , 50 de diamètre, et mis en pleine terre deux ans
après, réussissaient parfaitement dans les sols qui nous occupent.
M. Picquery employait, dans les mêmes circonstances, un procédé plus
avantageux encore; il plantait ses arbres dans de petits tonneaux
défoncés par un bout; au bout de quelques années, les douves étant
pourries, les racines s’étendaient au dehors; mais la forme contournée,
souvent horizontale, qu’elles avaient prise, en maintenait toujours une
partie dans le bon sol.
M. Duchartre rappelle à ce sujet un procédé ingénieux et écono-
mique, conseillé et pratiqué par Lardier, pour obtenir des arbres
fruitiers bons à planter dans les sols très-peu profonds. Il consiste à
établir une petite pépinière dans une couche peu épaisse de terre
reposant sur un fond impénétrable en planches bien jointes. Les racines
s’étalaient forcément dans une direction horizontale et pouvaient ensuite
s’accommoder au sol peu profond où elles étaient placées à demeure.
Au nombre des végétaux exotiques que la Société d’Acclimatation
s’occupe activement d’introduire, nous devons citer l’Érable à sucre,
sur lequel M. H. Nawkaski lui a communiqué de nouveaux détails. Cet
arbre habite le nord de l’Amérique, le Canada particulièrement; il
prospère surtout dans une terre grasse et non sablonneuse, sur les
versants des collines exposés au soleil. On en distingue deux variétés,
ou peut-être deux espèces; l’une (Érable proprement dit), fournissant
plus de sucre; l’autre ( Plaine ), donnant un sucre plus blanc. On obtient
— 224
ce produit en faisant des incisions au tronc et aux grosses branches, à
lepoque où les nuits sont froides et les journées bien éclairées par le
soleil; mais les vents du Nord sont nuisibles. Chaque arbre donne en
moyenne une livre de sucre, dont le prix de revient est de 30 à 35 cent.
Ce sucre peut être raffiné. L’Érable à sucre supporte bien en pleine
terre le climat de la France.
Il n’en est pas de même des Eucalyptus , arbres intéressants, origi-
naires de l’Australie et qui ne paraissent guère pouvoir végéter en plein
air que dans notre colonie d’Alger ou dans les régions les plus chaudes
du midi de la France. M. Ramel nous apprend que YEucalyptus
ohosa, arbre de médiocre grandeur et qui occupe des espaces immenses
sur le continent australien, pousse à la surface du sol des racines hori-
zontales; lorsqu’on coupe celles-ci, il en découle une eau très-pure et
très-saine. Ses feuilles fournissent en abondance une huile que l’on
emploie pour l’éclairage.
M. Boussière, vice-président honoraire de la Société centrale, a fait
subir avec succès à la taille habituelle du melon la modification sui-
vante. La première taille est pratiquée seulement au-dessus de la qua-
trième feuille, au lieu de la seconde; les pousses qui naissent à fais-
selle des deux feuilles supérieures sont supprimées. Les deux cotylédons
sont conservés tant qu’ils sont en état de fournir quelque nourriture ù
la jeune plante; mais on supprime les petits rameaux qui naissent de
leur aisselle.
M. Fortier-Marchand a communiqué à la Société d’Horticulture de
l’Aube une nouvelle méthode de culture des groseillers. Elle consiste
surtout à tailler long dans les premières années, et très-court quand
les arbustes sont à fruit, afin d’avoir de beaux produits. Sous ce rap-
port, la forme en quenouille est bien préférable à la forme ronde ou
en boule, qui plaît davantage à l’œil. M. Forlier laisse sur chaque pied
quatre ou cinq branches, qui durent cinq ou six ans; puis il les rem-
place par de nouvelles, ce qui fait que l’arbuste est toujours jeune. Il
recommande encore de pincer au-dessus du troisième nœud toutes les
branches latérales quand le fruit a atteint la moitié de sa grosseur;
cette opération a l’avantage de rendre les fruits meilleurs et la récolte
plus facile.
On a beaucoup discuté sur la valeur relative des pommes de terre
Blanchard et Marjolin. M. Gosselin, ayant fait quelques essais, a
reconnu que cette dernière donnait un produit double en moyenne. De
— 225 -
plus, comme ses liges s’élèvent très-peu, elle est bien plus propre que
l’autre à la culture forcée sous châssis.
M. Labourdette a mis sous les yeux de l’Académie des sciences, des
champignons de couche pesant en moyenne 600 grammes. Le sol sur
lequel ils ont été obtenus se composait uniquement de sulfate de chaux
fortement tassé; l’engrais ordinaire a été remplacé par du nitrate de
potasse, enfoui, avec les spores de l’Agaric, à une profondeur de 5 à
4 millimètres. Il y a là le germe d’une révolution dans la culture du
champignon de couche. L’ancienne méthode est, comme on sait, fort
compliquée, et les produits qu’elle donne ont un poids moyen de
100 grammes.
Le journal le Sud-Est signale l’avantage qu’il y aurait à établir des
cressonnières artificielles partout où coulent des eaux de sources, au
lieu de laisser envahir celles-ci par les roseaux ou d’autres herbes tout
au moins inutiles. L’établissement de ces cressonnières est peu coûteux ;
il suffit en effet de vider les fossés, de les débarrasser des mauvaises
herbes, puis d’enfoncer dans la vase ou dans le gravier des plants ou
des racines de cresson, avant d’y ramener l’eau. Les cressonnières du
Pas-de-Calais donnent un produit qu’on peut évaluer au moins à
2,400 francs par hectare. A. Delort.
MISCELLANÉES.
L’OEILLET ET SA CULTURE.
(Troisième article. — Voir la livraison précédente, page 205.)
Multiplication. — On sait que la multiplication a pour but la con-
servation de l’espèce ou de la variété. Elle est d’autant plus nécessaire
chez l’œillet qu’il n’est en réalité qu’une plante bisannuelle, bien qu’on
puisse, dans certains cas, la conserver pendant un plus grand nombre
d’années. Mais laissée en place et abandonnée à elle-même, elle doit
nécessairement périr au bout de la seconde année.
La multiplication se fait de deux manières :par semis et par marcot-
tage. Le premier mode, le plus naturel, d’après l’ordre établi, est fort
chanceux comme le dit avec raison M. Van Iloutte, et doit être laissé
226 —
aux horticulteurs qui le pratiquent dans le seul but d’obtenir de nou-
velles variétés; nous disons chanceux, parce que sur mille plantes on
obtient à peine une ou deux bonnes variétés. Ceci ne veut pas dire que
nous déconseillons à l’amateur de pratiquer le semis; bien au contraire,
car s’il veut en courir la chance, le gain d’une ou deux bonnes variétés
peut lui donner assez de satisfaction pour le dédommager de ses peines
et de son attente. Pour obtenir des résultats satisfaisants dans ce genre
de multiplication, on ne doit récolter la graine que des variétés les
mieux marquées, ou ne pas marchander le prix de la graine qu’il s’agit
d’acheter pour se former une collection.
Dès le mois de mars, ou au plus tard au commencement d’avril, on
sèmera en terrines, sur couche tiède, ou en pleine terre à l’exposition
du midi sur une plate-bande adossée contre un mur; on recouvrira la
graine d’une légère couche de terre sablonneuse, et on aura soin de pré-
server le semis des fortes pluies et des rayons trop ardents du soleil,
tout en maintenant constamment le sol humide. Nous préférons le
semis sur couche tiède et fait de bonne heure, parce que la graine lève
plus tôt et les plantes acquièrent plus de force pour l’époque critique
de l’automne et de l’hiver. La terre pour les semis doit être légère,
substantielle et demi-sablonneuse.
Aussitôt que la graine commencera à germer, ce qui a lieu 12-15 jours
après qu’elle est mise en terre, on se bornera à surveiller et à éloigner
les larves et les vers, très-friands de ces jeunes plantes. A la seconde,
d’autres disent à la troisième paire de feuilles, on commencera par
élaguer en repiquant ailleurs les jeunes plantes que l’on aura enle-
vées. Celles destinées à la pleine terre seront plantées à une distance
de 4-5 pouces, sur une plate-bande préparée d’avance comme nous
l’avons dit plus haut; le sol sera tenu propre et arrosé tous les jours
dans les temps de sécheresse. Celles destinées à être plantées en pots
seront traitées comme nous l’indiquerons plus bas, au paragraphe trai-
tant du rempotage. Elles doivent être, immédiatement après la trans-
plantation, copieusement arrosées à la pomme et protégées, pendant
quelques jours, contre le soleil. Pas n’est besoin de dire que les
jeunes plantes élevées en pleine terre deviennent plus robustes que
celles plantées en pots, et que ces dernières devront être rentrées au
commencement de l’hiver. Pour les semis faits sur une grande échelle,
on ne peut naturellement se servir de ce dernier mode de culture ,
parce qu’il demande trop de soins. On se borne à garantir les
— 227 —
plantes en pleine terre au moyen de claies recouvertes de branches.
Aux premiers jours favorables du printemps toutes ces jeunes
plantes seront placées, les unes sur une nouvelle plate-bande, à
1-1 - pied de distance, les autres séparément dans des pots de la
dimension voulue pour les y laisser fleurir. Les racines devront être le
plus possible dirigées vers le bas du pot; l’arrosement augmentera en
raison du développement de la végétation. Un point essentiel, c’est la
grande propreté pendant l’hivernage.
Le marcottage, qui n’a pour but que de conserver le type de l’individu
par le moyen de fragments de la plante, est une opération des plus
faciles. On choisit sur les vieux pieds, ayant fini de fleurir, les jets les
plus jeunes et les plus longs; on fait une petite rigole à proximité,
dans la terre adjacente; on y couche le rejeton, en enlevant les feuilles
là où il doit être enterré et en y faisant une incision peu profonde,
juste au-dessous du nœud qui doit plonger dans le sol, puis on l’y fixe
au moyen d’un crochet de bois et on recouvre avec quelques centi-
mètres de terre que l’on presse avec les doigts pour l’affermir. Après
cela on arrose à la pomme. Cette incision doit être assez profonde pour
que l’on puisse donner au rejeton la courbure nécessaire. Au bout de
4-5 semaines, les marcottes sont enracinées; on les plantera comme
nous l’avons indiqué pour les semis.
Il y a encore un autre moyen de multiplication, mais moins certain,
c’est celui pratiqué par boutures. A cet effet, on choisit les rejetons les
plus avancés que l’on coupe à quelques lignes au-dessous du troisième
nœud; on fend cette partie longitudinalement en croix jusqu’au nœud
même, et on l’enterre en écartant horizontalement les quatre chicots.
Les Allemands ont l’habitude de fendre ainsi la tige d’un nœud à
l’autre. Quant à nous, nous préférons une simple tranche tant soit
peu oblique, faite immédiatement au-dessous du nœud, avec un instru-
ment bien tranchant, ou bien la section des plus jeunes pousses tout
près de la souche.
Après le marcottage les vieux pieds, dit M. Van Houtte, ne sont ordi-
nairement plus bons à rien. Nous conseillons aussi de les réformer. Il
ajoute que les Picotes se marcottent surtout avec la plus grande
facilité, ainsi que les unicolores et les bizarres. Ceux qui exigent plus
de chaleur que la saison dans laquelle on opère ne le comporte,
doivent être marcottés sans châssis, et dans ce cas les vitraux devront
être ombrés. Les marcottes faites à l’arrière-saison ne devront , pour
228 —
plus de sûreté, être détachées du pied qu’après l’hiver et ensuite ren-
forcées sur plate-bande.
Floraison . — La floraison de l’OEillet commence au mois de juillet
et se continue, sans interruption, jusqu’à la fin d’août ou jusqu’en mi-
septembre, selon la précocité des variétés. Puisque tous nos efforts
doivent tendre à obtenir cette floraison dans tout son éclat, nous ne
devons rien négliger pour atteindre ce but.
Avant tout, l’amateur doit moins s’efforcer à produire un grand
nombre de fleurs que des fleurs bien constituées. Si c’est là son inten-
tion, il ne devra pas perdre de vue les détails suivants :
Sortir les plantes le plus tôt que faire se peut pour qu’elles se forti-
fient, car si elles restaient trop faibles, elles ne donneraient pas de
marcottes et la floraison laisserait à désirer ; supprimer les tiges à fleurs
qui dépasseraient le nombre de 5-4 et enlever les boutons trop nom-
breux, en n’en laissant que 5-4 par tige. Si l’on voulait sacrifier les
fleurs pour obtenir un plus grand nombre de marcottes, il faudrait
supprimer les premières tiges florales à mesure qu’elles se montrent
et n’en laisser plus tard qu’une ou deux dont les fleurs alors ne se
développeront que mieux. Cela se pratique souvent chez nous horti-
culteurs.
Un des grands défauts de l’OEillet et qui fait le désespoir des ama-
teurs, c’est la facilité avec laquelle les calices des fleurs se rompent.
Nous attribuons cet accident, comme nous l’avons déjà dit ailleurs, à
un excès d’eau ou à une nourriture trop forte. Néanmoins, comme il
est très- difficile d’obvier entièrement à cet inconvénient, par la raison
qu’il est moins aisé de calculer exactement la qualité et la quantité des
engrais contenus dans le sol, que la somme d’eau que nous adminis-
trons à volonté, il ne nous reste, pour les exemplaires en pots, qu’un
seul moyen artificiel et fort simple à recommander, c’est de faire une
ligature autour du calice, au dernier moment, au moyen d’une bande
légère que l’on réunit par les deux bouts avec de la gomme ou que l’on
maintient en place par deux morceaux de fil de laine, que l’on y fixe
en roulant les extrémités entre les deux doigts. En Angleterre, on
emploie ce moyen avec succès; nous ne le recommandons toutefois que
pour les variétés exquises.
Nous avons déjà dit qu’il faut rentrer les OEillets en pots et les
abriter, au moment où les boutons commencent à se monter en cou-
leurs; cette précaution est indispensable si l’on veut jouir d’une belle
— 229 —
et longue floraison; nous ajouterons qu’il faut cependant se garder de
trop les ombrer; une lumière tant soit peu diffuse vaut mieux.
Rempotage. — Une des grandes précautions à prendre pendant cette
opération, c’est d’éviter que la terre ne se détache des racines; si ce
malheur arrivait, il faudrait, pendant deux ou trois jours, traiter la
plante comme une bouture en la recouvrant d’un pot à fleur qu’on
n’ôterait qu’à l’entrée de la nuit. Sous cet abri, la plante reprendra
facilement. Le premier rempotage des marcottes se fera dans des pots
de trois pouces de diamètre pour les plantes isolées, et dans des pots
de 6-S pouces de hauteur sur 9-10 de largeur pour celles que l’on réu-
nira à 5-4 dans le même pot. L’un ou l’autre de ces moyens sont bons,
mais nous conseillons de planter de préférence isolément, parla raison
qu’on risque moins d’en détacher la terre au second rempotage, pour
lequel on emploiera les pots de la plus grande dimension que nous
venons de citer. On aura soin de drainer convenablement ces pots avec
des tessons mêlés de charbons de bois. Les dernières marcottes seront
détachées et plantées au commencement d’octobre. Au mois de no-
vembre, toutes les plantes en pots devront être rentrées, pour ne sortir
que dans les premiers jours de mars st le temps le permet. C’est alors,
ou peu de temps avant leur sortie, que les jeunes plantes doivent subir
leur dernier rempotage et que l’on devra placer les tuteurs qui seront
de 5 pieds de longueur et distancés de 2 pouces de la plante.
Nous répétons encore ici, que, pendant l’hiver, les OEillels doivent
être constamment aérés, même pendant les gelées et qu’alors surtout,
la propreté est de rigueur. On doit principalement éviter la chaleur et
une lumière diffuse. L’exposition la plus froide, c’est-à-dire, celle qui
maintient les plantes en repos complet jusque vers la fin de février ou
le commencement de mars est la plus à désirer, car si l’OEillet com-
mençait à végéter trop tôt, ou il faudrait retrancher ses premières
pousses ou celles-ci resteraient trop faibles pour donner une bonne
floraison.
Conservation. — L’OEillet est une plante qui tend à dégénérer rapi-
dement et qui dépérit par suite de la moindre négligence. Les causes
de celte dégénérescence sont : un sol trop maigre, une culture peu judi-
cieuse, ou le manque de soins continus; ajoutons à cela, la nature
même de la plante qui tend à dégénérer naturellement si on l’aban-
donne à elle-même. Aussi, est-ce là le motif qui nous fait conseiller
de réformer les vieilles plantes et de ne conserver que les jeunes. Ceci
— 250 —
nous explique suffisamment l’importance du marcottage au moyen
duquel nous conservons les variétés intactes. La facilité avec laquelle
se fait cette opération n’est donc pas un empêchement à pratiquer cette
méthode régulièrement, en se conformant au conseil que nous avons
donné plus haut.
Quant au dépérissement, nous l’attribuons à l’usage fatal de laisser
un trop grand nombre de fleurs à la plante, au manque d’air et à la
malpropreté pendant l’hivernage, ainsi qu’à la négligence des arrose-
ments pendant les grandes chaleurs. Nous avons déjà rendu attentif
sur ce point capital et nous ne pouvons trop insister pour que l’on y
apporte la plus grande attention.
L’OEillet a aussi un grand nombre d’ennemis qu’il faut savoir éloi-
gner ou combattre dans l’intérêt de sa conservation. Ces ennemis sont
les lapins, les limaces, les perce-oreille, les chenilles, etc. Les plantes
en pleine terre ont surtout à redouter les lapins si le jardin n’est pas
clôturé de murs; les limaces et les chenilles doivent en être écartées
par des visites régulières faites le matin de bonne heure; les perce-
oreille se prennent au moyen de petits pots remplis de foin humide et
placés à rebours au sommet des tuteurs. En visitant ces pots dans la
journée, on les y trouve réfugiés et alors rien de plus simple que de les
détruire. Le ver blanc du hanneton et la taupe-grillon sont très-friands
des racines de la jeune plante; la seule chose à faire, pour les tenir à
l’écart, c’est de visiter la terre qui sert au rempotage ainsi que celle
des plates-bandes qui doivent recevoir un plant d’OEillets.
La plupart des amateurs perdent leurs OEillets faute des soins les
plus simples et en abandonnent la culture, sous le prétexte que ces
plantes sont trop capricieuses ou trop délicates. Nous ne saurions être
de cet avis, par la raison fort simple, que ce prétexte n’en est pas un;
on a pu voir, au reste, que les soins que l’OEillet réclame, se bornent
à peu de chose, à une surveillance un peu plus qu’ordinaire, et nous
ajouterons que les résultats, qui en sont la suite, compensent largement
la sollicitude que l’on aura eue pour cette belle plante.
Pour nous conformer à la demande de quelques-uns de nos abonnés,
nous compléterons ce travail prochainement en publiant une liste des
meilleures variétés d’OEillels aujourd’hui répandues dans le commerce.
— 231 —
MONOGRAPHIE DES AGAVÉES,
PAR LE D r GARL KOCH ,
Professeur à l’Université de Berlin (1). — Traduit de l’allemand par A. de Borre .
Les terrasses élevées de la Californie méridionale et des parties septen-
trionales de la République mexicaine présentent souvent, pendant la
saison chaude, un aspect triste et désolé, à cause du manque d’eau; cela
ne les empêche cependant pas de compter au nombre des contrées gran-
dioses de l’Amérique. Tour à tour ce sont des rochers à parois raides,
ou des amas de pierres éboulées, à peine garnies de misérables lichens,
premiers rudiments de végétation. Un calcaire appartenant à une
époque plus récente se trouve bien égrené et transformé en partie en
une terre gris-jaunâtre, mais l’action du temps n’a pu agir que bien
faiblement sur la roche dure et d’origine volcanique qui se rencontre
en d’autres endroits; ce n’est donc que çà et là que la surface du sol
présente une faible couche de terre produite par la décomposition des
roches, mais cette terre n’offre aussi que peu de traces de vie végétale,
surtout par suite du manque d’eau, ce véhicule important de la nutri-
tion des plantes. Mais il n’en est plus de même là où il existe de grands
plateaux entrecoupés de lacs et de rivières, car alors on y rencontre
souvent la plus florissante végétation.
Dans les lieux secs et plus montagneux, on trouve des végétaux par-
ticuliers, le plus souvent isolés, parfois aussi réunis en groupes, et
qui se distinguent par une tige charnue, absolument dépourvue de
feuilles, ou par des feuilles grandes et épaisses, portées par une tige
peu marquée ou au moins fort courte. L’abondance d’eau contenue
dans ces plantes, qui forment la famille des Cierges ou Cactées, ou qui
appartiennent à celle des Agavées, forme un contraste frappant avec
la sécheresse qui règne, et dans l’air, et dans le terroir. La nature y a
pourvu en leur donnant, surtout dans l’Epiphlœum ou couche subé-
reuse de l’écorce, des cellules dont les parois ne laissent pas échapper
l’eau, comme chez les autres végétaux; en même temps, et principale-
ment dans les cellules plus vivantes de l’intérieur, se produisent des
actes nutritifs particuliers, au moyen desquels l’eau, qui n’existe
(t) Wochenschrift fur Gartnerei und Pflanzenkunde , 1860, p. 3.
— 252
jamais en quantité suffisante , à cause de la température de l’air
extérieur, est avidement attirée et retenue.
Pour ce qui regarde les Cierges, ce sont surtout des tiges ramifiées
et déprimées en forme de feuilles, ou des formes columnaires, que Fon
considère comme appartenant aux genres Opuntia et Cereus (dans leur
plus vaste acception), et qui généralement croissent par groupes dans
les contrées dont nous venons de parler. Les autres Cactées, comme les
Mammilaria , E chino cactus , etc., croissent de préférence dans les
plaines sèches et privées d’eau pendant l’été, qui existent dans toute
l’Amérique méridionale et sont connues sous les noms de Llanos et de
Pampas; les troupeaux de chevaux, retournés à l’état sauvage, qui
habitent ces plaines, ont coutume de briser à coups de pieds ces plantes
pour apaiser leur soif avec l’eau qu’elles contiennent. Mais ce ne sont
pas les Cactées qui vont faire l’objet de notre travail ; ce sont les plantes
de l’autre famille que nous avons tantôt nommée, les Agavées.
Si les Agavées, comme nous l’avons dit, sont des plantes d’une grande
influence sur l’aspect du paysage dans leur patrie, elles ont aussi une
grande importance au point de vue horticole. De plus, beaucoup d’entre
elles, et notamment celle qui est le plus répandue chez nous, VA gave
americana, se ressentent très-peu de nos conditions de climat, et peu-
vent même supporter un froid de quelques degrés. Elles s’emploient
de la manière la plus convenable sur les terrasses, à l’entrée des par-
terres, de préférence dans les parties des jardins qui doivent revêtir
un aspect exotique, et également sur les piliers des portes et le cou-
ronnement des murailles. Elles font aussi fort bien dans un jardin un
peu grand et élégamment disposé, en leur donnant un piédestal parti-
culier ou en les plantant dans une urne ou autre vase analogue. Cela
peut surtout se faire dans le voisinage des jets d’eau et des autres ou-
vrages hydrauliques, mais pas trop loin de la maison. Elles font même
aussi de l’effet environnées de parterres de fleurs, ou plantées au mi-
lieu de la courbure intérieure d’une grande pelouse.
Dans le jardin de M. Borsig, à Berlin, on voit deux magnifiques
exemplaires d’une variété vert-bleuâtre de VA gave americana à l’ex-
trémité d’une pelouse, entre deux petites pièces d’eau environnées de
parterres de fleurs, ce qui contribue à former l’effet charmant que
nous avons indiqué. Le jardinier en chef, M. Gaerdt, y a élevé deux
pyramides en laitier noir de quatre pieds de hauteur, portant des pots
en forme d’urnes avec des Agave , et autour de ces pyramides grimpent
253 —
des Lierres d’Éeosse , pas trop touffus. Quelques exemplaires de
Y Agave filifera et du Dasylirion acrotrichon , placés de la même
manière, font encore plus ressortir la beauté des deux Agave vert-
bleuâtre.
Les Agave , à l’exception naturellement des espèces trop herbacées,
sont encore très-convenables pour la décoration des grands rockworks.
On peut même arriver à produire un ensemble très-agréable au moyen
d’un simple rocher artificiel, que l’on couronne d’un Agave, et dont on
garnit les interstices avec des plantes grasses indigènes, comme des
Jourbarbes ( Sempervivam ), ou même des Sedum, entre autres le
S. Fabaria, à fleurs rouges, qui prend une coloration brun rougeâtre,
et le S. Telephium , mais surtout avec des Joubarbes des Canaries,
dont on a fait récemment avec raison le genre Æ onium*
Les Agave s’assortissent encore mieux avec les Cierges et les Yucca,
qui leur sont déjà géographiquement réunis. Le goût de ces plantes
grasses est redevenu à la mode ; et pourtant, à peu d’exceptions près,
on les cultive encore comme jadis, dans des caisses, et sans la moindre
idée de groupement esthétique. De cette manière, abstraction faite de
ceux qui aiment le baroque, on ne peut à notre avis, en avoir aucune
jouissance artistique, hormis le cas où l’une ou l’autre des espèces
vient à montrer ses belles fleurs. Mais combien une telle floraison
n’est-elle pas rare chez nous ! La proscription dont on frappe les Cac-
tées se comprend d’autant moins que ces plantes, mises en plein air
pendant la belle saison, y prospèrent mieux et prennent de la force
pour résister aux rigueurs de l’hiver.
Nous ne nous rappelons avoir vu qu’un seul jardin où les Cactées
eussent çpçu un arrangement conforme au bon goût, quoique dans un
espace limité. C’était chez Fr. A. Haage jeune, à Erfurt. Nous recom-
mandons cet arrangement à tous les amateurs. Assurément il pourrait
encore gagner en se déployant sur un plus grand espace et en recevant
aussi des Agave et des Yucca .
Il y avait un très-beau groupe d 'Agave au Parc de Weimar, à l’époque
où M. Petzold, aujourd’hui inspecteur du Parc à Muskau, en avait
encore la direction. Il s’y trouvait dix à douze plantes cultivées en
pleine terre sur un monticule circulaire ; l’hiver, on les enfouissait sous
des lits de feuilles et on les recouvrait d’une maisonnette. Elles crois-
saient ainsi extraordinairement vite, et donnaient leurs fleurs beau-
coup plus tôt, de sorte que, pendant de longues années, il s’y élevait
Octobre 4861. 20
— 234 —
presque chaque été une puissante inflorescence qui contribuait à em-
bellir l’ensemble. C’est là ce que nous recommandons sérieusement
aux amateurs, d’autant plus que les frais d’entretien en sont très-
minimes.
Les Agavées sont concentrées dans l’Amérique centrale, le Mexique
et la Californie méridionale, ainsi que dans les Antilles; elles dimi-
nuent vers le nord et le vers le sud quant au nombre des espèces et à
celui des individus. On pourrait peut-être nier que des membres de
cette famille eussent été originairement aussi abondants qu’aujour-
d’hui dans les contrées chaudes et reculées de l’Amérique du Sud. En
tout cas, le nombre en devait certainement être moindre. Leur exis-
tence comme plantes indigènes dans les Indes orientales et les îles de
la mer du Sud, est plus que problématique. Quant à Y Agave ameri -
cana L., il n’est évidemment pas indigène dans l’Europe méridionale,
non plus que dans le nord de l’Afrique, bien qu’il y soit aujourd’hui
comme naturalisé.
V Agave americana , si pas même tous les Agave , appartient à celte
catégorie de plantes qui, malgré les limites resserrées de leur patrie
naturelle, se sont répandues au loin avec les hommes; une fois plan-
tées dans un lieu où elles rencontrent des conditions favorables, elles
s’y naturalisent bientôt, et s’y multiplient souvent d’eîles-mêmes sans
le secours de l’homme à un tel point, qu’elles éliminent des plantes
naturelles de l’endroit.
Le nombre des plantes qui agissent de la sorte , est plus nombreux
qu’on ne le croit; leur énumération ferait un travail intéressant. Nous
mentionnerons, en passant, notre Folle-Avoine (Avena falua), qui croît
aujourd’hui en quantités incroyables et couvre de grandes surfaces en
Californie, surtout dans la vallée du Sacramento, dans des lieux où nos
céréales n’ont encore été cultivées que bien peu ou même pas du
tout. Elle y a métamorphosé complètement l’aspect naturel de la
végétation.
Nous possédons sur l’histoire des Agavées un excellent mémoire qui
a été imprimé dans les numéros 44 à 51 du Münchener gelehrtcn
Anzeigen de l’année 1855, et qui a pour auteur le célèbre voyageur au
Brésil, Martius. Il a d’autant plus de valeur que nous possédons bien
peu de semblables travaux, magré le besoin qui s’en fait sentir. Nous
commencerons par lui emprunter quelques détails sur l’espèce qui
nous est le mieux connue, VA. americana , dans l’espoir d’augmenter
— 255 —
l'intérêt qu’on porte déjà à cette plante assez répandue chez nous. Elle
appartient en effet aux plantes utiles les plus importantes qui existent.
Les pays méridionaux sont sous ce rapport plus favorisés de la na-
ture que nous. En général nos plantes utiles ne nous donnent qu’un seul
produit et ne trouvent qu’un seul emploi , tandis que celles des pays
chauds répondent ordinairement à divers besoins. Nous pouvons citer
les Bananiers, beaucoup de Palmiers , l’Arbre à pain, etc. Il en est de
même, comme nous l’avons dit, de Y Agave americana et de plusieurs
autres espèces semblables et également utiles. Depuis un temps immé-
morial, on prépare avec les fibres de ces plantes grasses, dans les pays
où elles croissent naturellement, toutes sortes d’objets tressés ou tissés,
tels que des filets, des cordes, des souliers, des manteaux, qui sont
extrêmement solides. Depuis longtemps, cette industrie s’est aussi
établie dans les pays voisins, tels que l’Amérique du Sud, et plus
récemment dans l’Afrique septentrionale, surtout à Tunis. Nous en
possédons même des échantillons , entre autres des bonnets et des
bourses, qui témoignent de l’excellence de ces fibres et se recomman-
dent par là à l’attention du public.
Aux Antilles, ce sont les Furcrœa qui sont utilisés de cette manière.
Les hamacs où les indigènes dorment dans les temps chauds, sont
particulièrement formés avec les fibres du F. gigantea ; et on en fait
encore des filets, des nattes et surtout des housses de chevaux. De
même, on nous apprend que la plus petite des espèces, Y Agave
Poselgeri Salm-D., est employée dans sa patrie à faire une sorte de
ficelle.
Un phénomène bien singulier c’est que les fibres de ces plantes
grasses, si remarquables par leur mollesse intérieure, présentent pré-
cisément une solidité qui les rend propres à être employées dans les
arts. Nous rappellerons, par exemple, le Sanseviera teretifolia , qui a
été récemment figuré et décrit par Hooker, dans le Botanical Maga-
zine , et qu’on utilise aujourd’hui sur les côtes occidentales et orien-
tales de l’Afrique. Les fins tissus qui en proviennent se sont déjà intro-
duits en Angleterre.
Avec les feuilles de Y Agave americana , on fait encore du papier;
et on les emploie aussi à couvrir les toits, tandis que les grandes
épines servent d’aiguilles aux naturels , et fonctionnaient autrefois
comme poinçons, dans les sacrifices. On fait des confitures avec le
cœur de la plante ; le scape desséché devient un combustible. Enfin une
— 256 —
application des plus importantes est l’extraction d’une sève sucrée,
qui sert à préparer le Pulque, la boisson nationale des Mexicains. C’est
particulièrement dans ce but que l’on cultive la plante en grand dans
presque toutes les contrées chaudes de l’Amérique.
La formation de cette sève est d’une très-grande importance au point
de vue physiologique; elle n’apparaît en grande quantité qu’à l’époque
où les fleurs naissent avec leur scape ou support commun, mais elle
existe depuis leur premier développement au cœur de la plante jusqu’à
l’entier épanouissement et probablement même jusqu’à la maturité des
fruits.
La plante croît, suivant les conditions plus ou moins favorables du
lieu où elle se trouve, pendant huit, dix ou quinze ans, par un simple
grossissement des feuilles, sans qu’aucun changement se manifeste
dans la tige qui reste raccourcie. Chez nous, cette phase dure encore
plus longtemps, et beaucoup d’exemplaires semblent ne jamais arriver
jusqu’à la floraison. Mais l’assertion que ces plantes doivent atteindre
l’âge de cent ans avant de pouvoir fleurir, est de tout point fausse.
Nous avons même vu en Allemagne des plantes qui, placées dans
des conditions favorables, fleurissaient dès l’âge de quinze ans.
Il existe pourtant d’autres espèces que nous a fait connaître le cé-
lèbre voyageur Karwinsky, et qui doivent voir s’écouler l’espace de
400 ans, avant que leur tige, haute alors de 15 à 16 mètres, déve-
loppe une panicule de 5 mètres de hauteur seulement, qui se couvre
d’une quantité de fleurs blanches, et présente le plus beau coup d’œil.
Zuccarini a donc donné avec beaucoup de justesse à cette espèce l’épi-
thète de longœva, c’est-à-dire qui vit longtemps ; sa description ( Acta
Acad . LeopoldO'Carol. Nat . Cur. XVI, 2, p. 666, tab. 48) est accom-
pagnée d’une planche faite d’après un très-joli dessin de Karwinsky.
Le Furcrœa longœva pourrait bien être, de toutes les plantes mono-
carpiennes, celle qui met le plus de temps à fleurir et à fructifier.
En même temps, et probablement d’après les mêmes lois qui font
que chez les femelles des mammifères, le lait se produit en abondance
dans des organes de sécrétion particuliers, peu de temps avant et
après la parturition, il s’opère chez ces plantes la plus riche formation
de matières nutritives (gomme, suc aqueux, amidon, sucre, etc.), et
avec tant de promptitude que le scape floral à peine sorti du bouton
atteint dans sa patrie sur l’espace de 5 à 5 semaines une hauteur de
6 mètres et plus, parfois même de 11 mètres. Chez nous, la marche de
— 237 -
ce phénomène est plus lente, et, en général, il faut en Allemagne un
espace de 3 à 4 mois pour l’entier développement de ce scape.
Une autre espèce, le Furcra gigantea, donne parfois des bulbilles
au lieu de graines. Le scape ainsi chargé pèse environ 100 kil. et a par
conséquent augmenté chaque jour d’un kil. Martius a vu une autre
tige qui, dans l’espace de vingt et un jours, avait acquis une hauteur
de 9 | mètres.
Quand on considère quelles quantités de matières nutritives ont du
être consommées, rien que pour produire toutes les cellules dans la
formation de ce scape, et combien en outre il a fallu d’eau pour con-
courir à cette assimilation, on se rend d’autant moins compte de la
manière dont cela s’est fait, que l 'Agave fleurit justement à l’époque
des plus fortes chaleurs, alors que l’air, et encore plus le terrain envi-
ronnant, se trouve à son maximum de sécheresse. On doit encore plus
s’émerveiller de la grande activité vitale des cellules, qui se trouvent
en si peu de temps capables de rendre assimilables les matières ab-
sorbées. On comprend qu’il serait ici impossible d’attribuer de pa-
reils phénomènes à de simples affinités chimiques qui ne seraient pas
déterminées et dominées par une puissance spéciale, inhérente à l’in-
dividu vivant.
Une particularité intéressante est que l’activité productrice de ces
matières végétales n’est nullement enrayée, quand on enlève du cœur
de la plante le commencement du scape. On fait même cette opéra-
tion, afin d’obtenir cette sève riche en matière saccharine, et on pro-
longe en même temps par là la durée de cette production de 3 et même
de 3 mois au delà du temps normal de la floraison, qui est de quelques
semaines. Suivant A. de Humboldt, les Indiens recueillent trois fois
par jour une forte quantité de cette sève (200 pouces cubiques de
Prusse) dans un réceptacle qu’ils forment en liant ensemble les feuilles
supérieures. Dans les terrains moins fertiles, les sucs sont moins abon-
dants, de sorte qu’on peut évaluer, en moyenne, le produit d’une
plante, pendant toute la saison, à environ 130 bouteilles à vin; mais
chez une plante vigoureuse, la production pourra parfois s’élever au
double de la quantité indiquée par Humboldt.
Du reste, dans notre climat, il ne peut être question d’obtenir de ces
plantes une semblable production. Il est néanmoins à regretter qu’on
n’ait encore fait aucune expérience à ce sujet. A en juger d’après la
masse de nectar que l’on trouve chez nous dans leurs fleurs, la sève
258 —
fournie par la tige pourrait encore être en proportion notable. Cette
quantité considérable de matières nutritives donne l’explication de
la promptitude de la croissance, le sucre se transformant principale-
ment en cellulose. La fécule, qui se dépose plus tard dans les graines,
est en quantité relativement moindre.
Les pays chauds nous présentent plus d’un exemple de semblables
phénomènes. Ainsi nous devons notre Sagou et notre sucre de cannes,
à une semblable activité vitale chez le Palmier à sagou et chez la Canne
à sucre, pendant l’époque qui précède la floraison. Chez la Canne à
sucre, si on laisse passer le moment précis où l’on doit couper les tiges,
on n’obtient plus qu’une quantité de sucre beaucoup plus faible. Sui-
vant M. de Martius, un seul Sagoutier de l’archipel de la Sonde, avant le
développement de son inflorescence, haute de 6 mètres, peut donner
400 à 150 kilogrammes de la farine nutritive que l’on a appelée Sagou.
Comme nous l’avons dit précédemment, la sève des Agave sert au
Mexique et dans les pays avoisinants, à fabriquer, par une simple
fermentation, la boisson nationale, dite Palque. Elle ressemble, dit-
on, pour l’aspect, à notre petit-lait, mais elle a le goût et les propriétés
rafraîchissantes du cidre. La culture de ces plantes, quoique encore
très-considérable, a beaucoup diminué, depuis que les Espagnols ont
perdu le Mexique. Quoique, à celte époque, l’impôt prélevé sur l’intro-
duction de cette boisson dans les grandes villes fût très-peu élevé, il
montait en 1795, rien qu’aux portes de Mexico et de La Puebla, à plus
de 800,000 dollars (4,144,000 francs).
Chez une autre espèce, Y Agave potalorum Zucc., la masse des sucs
nutritifs ne paraît pas être consommée entièrement par la plante, car
les Mexicains en ramassent les vieux scapes, et, après les avoir dé-
pouillés de leurs feuilles, les font servir à la préparation d’une bois-
son enivrante particulière.
Parmi les nombreuses espèces que nous cultivons dans les jardins,
Y Agave americana est la première qui ait été introduite en Europe
et elle s’est si promptement répandue en Portugal, en Espagne et en
Italie, ainsi que sur la côte opposée de l’Afrique septentrionale, que
l’on peut, comme nous l’avons dit, l’y regarder comme naturalisée.
Elle doit avoir paru d’abord en 1561 en Italie, et deux ans après,
le célèbre botaniste Clusius la vit aussi en Espagne, dans son voyage
avec le marchand Fugger. A cause de ses feuilles épaisses, il la prit
pour un Aloës, et il la décrivit comme telle.
— 239 —
An t. de Jussieu fut le premier qui distingua génériquement YAgave
americana des Aloës, et d’après les documents existants, dès 1723,
il le désignait dans ses leçons sous le nom â’Aloides, tandis que Linné
continua à la considérer comme un Aloës jusqu’en 1763. C’est en cette
année qu’elle reçut de lui le nom tYAgave, c’est-à-dire l’admirable, la
superbe. Linné n’a décrit que quatre espèces du genre; après lui,
Willdenow (1799) en compte déjà 7, et, en 1815 on en connaissait
encore 3 de pius, d’après le Gartnerlexicon de Dietrich. Dans le
Systema vegetabilium de Roemer et Schultes, on en trouve déjà
décrites 21 espèces, dont trois à la vérité sont douteuses. Les décou-
vertes de Karwinsky y ajoutèrent 7 nouvelles espèces. Kunth (1840)
en connaît 46, plus une douteuse, et onze connues seulement de
nom, ce qui porte le chiffre total à 58. Depuis cette époque, plus de
20 espèces encore ont été décrites ou au moins introduites dans les
jardins, ce qui fait qu’on en peut connaître maintenant plus de
70 espèces.
Jacquin remarquait déjà en 1788 ( Collect ., II, p. 312), qu’un petit
nombre à’ Agave se distinguaient essentiellement du reste des espèces
par une corolle à six pétales, et il croyait que ce motif était suffisant
pour la création d’un nouveau genre. Ce genre fut établi cinq ans
plus tard (Bail, des séances de la Soc. Philom ., I, p. 65) par Yentenat,
professeur de botanique à Paris, qui le nomma Furcrœa , en l’honneur
de son collègue, le professeur de chimie Fourcroy. Ce nom, qui était
bien latinisé, fut pourtant changé par de Candolle et Tussac en Fur-
crœa, et Schultes poussa même le pédantisme germanique jusqu’à
vouloir rétablir le nom dans toute la rigueur de son orthographe, et
nomma le genre Fourcroya , puis Endlicher le changea encore en
Furcroya. Nous avons ainsi pour ce genre quatre orthographes diffé-
rentes, dont nous adoptons et recommandons la plus ancienne (1).
Nous doutons toutefois que le genre Furcrœa soit un bon genre.
En tout cas, il n’est pas naturel. C’est en vain que Zuccarini se donne
(1) La règle aujourd’hui à peu près généralement établie dans toutes les parties
de l’histoire naturelle, est de laisser le nom propre avec toute son orthographe
dans la racine du nom latinisé, quelque étrange que cela puisse parfois paraître,
et cela, pour éviter de rendre méconnaissables certains noms. Qui pourrait
reconnaîlre le nom de Desfontaines dans le genre Fontanesia ? Toutefois nous
n'avons pas voulu dans ce travail modifier l’orthographe adoptée par le savant
professeur de Berlin, d’autant plus qu’on pourrait aussi invoquer le respect dû au
nom imposé par le fondateur du genre. ( Note du Trad.)
4 »
— 240 —
beaucoup de peine pour en justifier l’existence par de nouvelles rai-
sons, telles que la position des étamines au-dessus de l’ovaire, leur
renflement à la base ainsi que celui du style. A notre avis, cela ne suffit
pas encore; nous le considérerions plus volontiers comme un sous-
genre, bien qu’une distinction soit encore fournie par la géographie,
les Furcrœa croissant principalement dans les Antilles, et les Agave,
sur le continent. [La suite à la prochaine livraison .)
NOTES POUR LES POIRIERS.
Dans plusieurs variétés de poiriers, les rameaux au lieu de pren-
dre une direction verticale, sont portés à s’incliner et à se recourber
ce qui a l’inconvénient de former des coudes qu’il est difficile de faire
disparaître. M. Raimbaut, pépiniériste à Montreuil, a eu l’heureuse
idée, par un procédé fort simple, d’obvier à cet inconvénient. Lors de
la taille en vert, il laisse au-dessus de l’œil qu’il choisit pour le prolon-
gement, un onglet de 5 à 7 centimètres, dont on éborgné les yeux, cet
onglet sert de tuteur pour attacher le rameau de prolongement lors-
qu’il est encore herbacé et l’oblige ainsi à pousser verticalement. Nous
avons vu celte méthode réussir sur les variétés les plus rebelles.
Nous avons aussi remarqué chez cet habile et intelligent arboricul-
teur un procédé dont il use avec succès pour égaliser ses rameaux
de prolongement; lorsqu’un rameau s’emporte, il le pince à l’extré-
mité en supprimant l’œil du dedans; de cette manière ce rameau
reste environ six semaines sans s’allonger, et donne aux autres le
temps de le rattraper. C. Morel.
NOTICE NÉCROLOGIQUE.
Nous venons de recevoir la nouvelle de la mort de notre compatriote
et naturaliste voyageur, M. Libon , qui explore depuis deux ans le
sud du Brésil, pour compte de l’établissement de M. J. Linden à
Bruxelles. On sait que M. Libon a parcouru antérieurement le Brésil
pendant cinq ans pour compte de M. De Jonghe et qu’un grand nom-
bre de belles plantes furent introduites par lui dans nos cultures.
Aujourd’hui la mort est venue surprendre cet infatigable voyageur,
dans l’intérieur du Brésil, au milieu de ses travaux et au moment où
il se préparait à revenir dans sa patrie.
C’est encore une des victimes du dévouement à l’horticulture.
#
PLANTES FLEURIES EN SEPTEMBRE.
Serre chaude.
Ardisia crenuiata. — Amaryllis aulica. — Agapanthus umbellatus. — Aphelandra
aurantiaca. — Adamia versicolor. — Æchmea fulgens. — Aristolochia arborea.
— Bégonia semperflorens. — B. Ingrami. — B. fuchsioides. — B. miniata. —
B. sp. pl. — Bertolonia marmorea. — Billbergia fasciata.— Centradenia grandiflora.
— Columnea erythrophæa. — Gesneria cinnabarina. — Hoya carnosa. — Justicia
carnea. — J. rubra. — Meyenia erula. — Nidularium rubrum. — Phyllanthus
erubescens. — Pitcairnea punicea. — Rondeletia speciosa. — Spigelia ænea. —
Stapelia sp. pluri. — Stephanotis floribunda. — Strelitzia reginæ. — Theoprasta
nobilis. — Triolena scorpioides.
Serre froide.
Alstroemeria acutifolia. — A. aurea. — Amaryllis formosissima. — Agératum
cœruleum. — A. Eupatorium. — Agnostus sinuatus. — Amphicome Emodi. —
Bouvardia Houtteana. — B. longiflora. — B. Hogarthii. — Bignonia grandiflora.
— B capensis. — Canna indica. — C. Warscewiczii. — Crowea elliptica. —
Clerodendron Bungei. — C. fragrans. — Crinum amabile. — C. americanum. —
Cuphea platycentra. — C. eminens. — Clethra arborea. — Datura arborea. — -
Dianthus Caryophyllus. — Daphné Delphinii. — Escallonia montevidensis. —
E. macrantha. — Erythrina crista-galli. — Eupatorium cœlestinum. — Eucomis
punetata. -§ E. regia. — Fuchsia Dominiana. — Gardénia grandiflora. —
Houstonia coccinea. — Indigofera purpurea. — Hydrangea Hortensis. — Habro-
thamnus elegans. — Jasminum gracile. — J. odoratissimum. — Lasiandra Fon-
tanesiana. — Lilium longifolium. — Plumbago Larpentæ. — Russelia juncea. —
Polygala grandiflora. — Salvia splendens. — Rochea falcata. — Sparmannia
africana.
Orchidées.
Brassia Lawrenciana. — Cattleya Auckîandiæ. — Catlleya crispa. — Cypripe-
dium javonicum. — C. Feirieanum. — C. superbieus. — Epidendrum prismato-
carpus. — Galeandra Stangei. — G. barbatum. — Lycaste Skinneri. — Maxillaria
venusta. — Miltonia spectabilis. — Nephelaphyjlum pulchrum. — Odontoglossum
Bictoniense. — 0. leucoehylon. — Sophronitis violacea. — Stanhopea oculata. —
Yanda tricolor. — Yanda suavis.
Catalogues.
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Nous recommandons surtout son catalogue de graines reçues récemment du
Mexique, récoltées par M. Roezl , et qui se recommande par un grand nombre
d’espèces nouvelles et intéressantes.
/
Sommaire du M° flO.
Octobre fl 861.
Plantes figurées. — Pétunia variés. . . 217
Revue des plantes nouvelles et rares. —
Dendrobium Hillii — Gomphia olivæ-
formis. — Caiailium bicoloiyvar. Ver-
sebaîfeltii .— 7 Cerinthe retorta. — Chysis
aurea, var. Limminghei. — Garten-
flora . 218-220
Revue de l’horticulture française . . . 222
Miscellanées. — L’OEillet et sa culture.
( 5 e article.) 225
Monographie des agavées, par le docteur
Cari Koch 231
Notes pour les poiriers 240
Notice nécrologique ib.
GRAVURES.
Planche XVIII. Pétunia variés.
EN VENTE :
A Bruxelles, chez V e Parent et Fils. — A Paris, chez’ A. Goin
MANUEL THÉORIQUE ET PRATIQUE
DE LA
CCLTIlill FORCÉE DES ARBRES ET ARBRISSEAUX FRUITIERS
Comprenant -tout ce qui concerne Part de faire mûrir leurs fruits hors de saison et les
moyens de faire de cette culture une spéculation lucrative, avec figures intercalées
dans le texte et représentant les meilleurs modèles de serres à forcer telles qu’elles
sont construites dans les forceries de l’Angleterre, de l’Allemagne, de la France et de
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chacun des mois de juillet à mai; contenant le nom et la synonymie des poires,
leur description et celle de l’arbre; le mode de culture; l'indication de l’origine
et l’époque de la récolte des fruits, avec la silhouette de chacune, dessinée
d'après nature et de grandeur naturelle ; suivie de considérations générales sur
la culture et la taille du Poirier.
PAU P. DE M***.
Deuxième édition. 1 vol. in-8°. Prix franco : 3-50.
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